Voir notre POLITIQUE DE CONFIDENTIALITÉ.
Paul-André Gallant, M.P.O., orthophoniste et président de l’Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec
Gisèle Tassé-Goodman, présidente du Réseau FADOQ
Valérie Giguère, orthophoniste et présidente de l’Association québécoise des orthophonistes et audiologistes
Marie-Ève Beaulieu, audiologiste et représentante en audiologie de l'Association québécoise des orthophonistes et audiologistes
Au Québec, 864 000 personnes présentent une déficience auditive permanente, soit 10 % de la population. C’est l’une des déficiences physiques les plus répandues. Environ 32 % des personnes âgées de 65 ans ou plus ont une déficience auditive suffisamment importante pour nuire à leurs activités quotidiennes. Un délai moyen de sept ans s’écoule avant qu’une personne qui soupçonne avoir une perte auditive demande de l’aide et seulement 20 % des adultes atteints de perte auditive utilisent des appareils auditifs, notamment en raison des prix trop élevés. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, une personne sur quatre vivra avec une perte auditive d’ici 2050. Il s’agit d’un véritable enjeu de santé publique !
Une déficience auditive non traitée entraine des conséquences négatives pour la santé : augmentation du risque de démence, fatigue cognitive, isolement social, diminution de la qualité de vie et des activités, détresse psychologique, anxiété, risque de chute, perte d’emploi, etc. Le Québec connait actuellement de grands problèmes quant à l’accès aux appareils auditifs. Tout cela engendre des coûts importants et évitables pour notre système de santé. Il existe pourtant des solutions au manque d’accessibilité.
Aux États-Unis, une nouvelle législation a imposé à la Food and Drug Administration (FDA) de créer une nouvelle catégorie d’appareils auditifs destinés aux adultes ayant une perte auditive perçue comme légère à modérée. Soumis à une réglementation pour en assurer qualité et utilisation sécuritaire, ces appareils appelés Over-the-Counter Hearing aids ou OTC (appareils auditifs en vente libre) sont désormais accessibles. Beaucoup moins dispendieux que les prothèses auditives actuellement disponibles, les OTC pourraient aider à diminuer les conséquences néfastes et à long terme d’une surdité. Les audiologistes du Québec sont d’avis que l’arrivée de cette nouvelle gamme de produits permettrait aux personnes de comparer les prix, d’explorer leurs options et de prendre en charge la gestion de leur santé auditive. On parle ici d’un impact majeur sur l’accessibilité. Les gouvernements fédéral et provincial doivent légiférer rapidement pour assurer leur disponibilité au Canada et au Québec, tout en encadrant leur utilisation pour assurer la protection du public.
Plusieurs personnes n’hésitent plus à traverser les frontières pour se procurer des appareils auditifs et réaliser des économies substantielles. Les médias se sont d’ailleurs penchés sur la question au cours des dernières années.
Contrairement au reste du Canada ou aux États-Unis, les audiologistes du Québec ne peuvent pas vendre, poser ou renouveler des appareils auditifs alors qu’elles et ils possèdent les compétences pour le faire. L’élargissement des pratiques professionnelles est une opportunité pour permettre à l’ensemble des professionnelles compétentes et professionnels compétents de poser ces actes.
Nous croyons qu’en misant ainsi sur la compétence de chaque spécialiste de la santé auditive, un marché plus compétitif s’installerait, ce qui entrainerait une diminution des coûts des appareils auditifs. C’est la loi de l’offre et la demande.
Le gouvernement du Québec a les moyens et le devoir de corriger la situation pour le bénéfice de la population.
Actuellement, il est difficile de faire un choix éclairé pour l’achat de leurs prothèses auditives. Il existe un flou quant à la valeur réelle des produits disponibles sur le marché et sur la performance éprouvée de ceux-ci. Il faut mettre en place un mécanisme afin d’imposer un affichage exhaustif des composantes des prix, comme c’est désormais le cas pour tous les médicaments achetés en pharmacie, ainsi qu’une présentation claire des avantages techniques des différents modèles d’appareils offerts.
Il faut défaire un mythe. Les appareils auditifs offerts par le programme de la RAMQ ne sont pas de mauvaise qualité comparativement à des modèles dits « haut de gamme ». En réalité, ces appareils peuvent très bien convenir à une grande partie de la population ayant une déficience auditive.
Ce programme gouvernemental, depuis longtemps en place, doit toutefois être revu pour refléter les besoins d’aujourd’hui. Actuellement et sauf exception, le programme ne couvre qu’une seule prothèse auditive. C’est le cas notamment pour les personnes retraitées éligibles au programme. Cette situation pose préjudice à de nombreuses personnes qui, normalement, auraient besoin de deux appareils.
Les problèmes d’accessibilité aux appareils auditifs sont grands et il faut y pallier sans plus attendre. Des solutions existent pour améliorer durablement la santé auditive de centaines de milliers de personnes et aider à prévenir l’apparition de problèmes de santé évitables. Il est temps pour les autorités gouvernementales d’agir !