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Les 26 et 27 janvier derniers avait lieu le Colloque sur la collaboration interprofessionnelle en santé et relations humaines. Le président de l’Ordre, M. Paul-André Gallant, a participé avec grand plaisir à une table ronde en compagnie de M. Daniel Paré, sous-ministre associé, direction générale des ressources humaines et de la rémunération, ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS), de Mme Julie Bouchard, présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, et de deux patientes partenaires. Lors de cette table ronde, il a été question de la mise à profit des compétences professionnelles pour mieux répondre aux besoins de la population. Nous vous invitons à lire un résumé du discours qu’il a prononcé dans le cadre de cet événement.
« Quand on m’a demandé de faire partie de ce panel, en tant que président de la Table de collaboration interprofessionnelle en santé et services sociaux, j’ai beaucoup hésité. Il n’est pas évident de représenter l’opinion de 29 ordres professionnels. Donc, j’aimerais faire une mise en garde dès le départ. Il y a des milliers de pièges dans lesquels je pourrais tomber, mais je vais me contenter de transmettre ce qui relève de mon opinion, et ce, à la lumière de tout ce que j’ai entendu depuis sept ans dans le système professionnel.
Je crois que le mot qui s’impose ici est reconnaissance. Si vous le voulez bien, afin de porter un regard le plus lucide possible, je nous propose un exercice avec ce mot pour bien comprendre ce qui fait obstacle, à mon avis, à l’actualisation du plein potentiel des professionnelles et des professionnels sur le terrain.
Tout d’abord, dans le mot reconnaissance, il y a le mot naissance et, pour moi, cela se réfère à l’origine, c’est-à-dire à l’importance de comprendre d’où l’on vient et les systèmes qui nous encadrent.
Le système professionnel a 50 ans cette année. Certes, il a évolué au rythme de rares réformes ciblées, et parfois cosmétiques, ou de modifications réglementaires qui relèvent d’un chemin de croix, mais répond-il encore au besoin de la société d’aujourd’hui ? J’en doute fortement. En effet, la formation initiale des professions en santé et services sociaux, la recherche et l’innovation ont évolué avec les besoins et les exigences de la société. Toutefois, la lourdeur et l’opacité du traitement réglementaire ainsi que la lenteur de la législation ont engendré une distorsion entre la compétence acquise et évolutive des professionnelles et des professionnels et l’étendue de leurs champs d’exercices, ce qui limite l’encadrement et le pouvoir de surveillance des ordres. En plus, cela rend les champs d’exercices et les pratiques cliniques de beaucoup de professionnelles et de professionnels figés à une autre époque. Il faut impérativement repenser l’agilité du système professionnel en donnant plus de souplesse et de pouvoirs aux ordres pour modifier leur réglementation. Du même souffle, il faut que le cadre des modifications législatives incarne davantage la vitesse de l’évolution des pratiques en phase avec les besoins.
Revenons à notre mot : reconnaissance. Dans ce mot, il y a aussi le mot connaissance qui signifie, pour moi, la connaissance de l’autre et les connaissances partagées. Les professionnelles et professionnels de la santé et des services sociaux possèdent un spectre très large de savoir, de savoir-faire et de savoir-être qui sont souvent méconnus du public, de l’appareil gouvernemental, des milieux, mais surtout parmi les professionnelles et les professionnels. Il s’agit là d’un frein important à la mise à profit des compétences de l’ensemble des professionnelles et des professionnels et surtout à la véritable collaboration professionnelle.
Revenons maintenant à cette collaboration interordre. Certes, les ordres ont beaucoup progressé sur le plan de la collaboration. Néanmoins, je le dis souvent, en temps de paix, il est facile de collaborer. Quand il n’y a rien qui nous menace, il est facile d’aller vers l’autre, facile de nous écouter. C’est toutefois inévitable que nos vieux réflexes reviennent, particulièrement dans un contexte où une profession ou des professions s’invitent à la table d’une autre. Dans un contexte d’élargissement des pratiques professionnelles, c’est souvent l’identité même des professions qui se trouve ébranlée, et quand l’identité est en jeu, nous nous replions souvent sur nous-même. Dans ce contexte, je nous invite à faire preuve d’humilité, car les soins et services en santé, c’est un nous collectif, ce n’est pas l’affaire d’une profession.
« Comment cette profession peut-elle aider la mienne à offrir les meilleurs soins et services à la patiente ou au patient ? »
Enfin, si on prend globalement le mot reconnaissance, il faut absolument que l’organisation du travail dans les soins et services publics reconnaisse et incarne l’ensemble des compétences de chaque professionnelle et professionnel pour ainsi mettre à profit pleinement leur savoir au service de la population.
Je termine en disant qu’il ne faut pas oublier que dans le mot reconnaissance, on entend le mot sens. Que la plupart du temps, les solutions apportées reflètent le gros bon sens et ont du sens pour la fluidité des corridors de services et pour les usagères et les usagers ! Actuellement, il y a une volonté de défaire cette vision en silo des services professionnels en santé et services sociaux. On soigne plutôt qu’on prévient, on s’attarde à la maladie plutôt qu’au déterminant de la santé. Il faut inverser ce sens et c’est le message que doivent porter les professions en 2023. »
Votre président,
Paul-André Gallant, MBA, M.P.O., orthophoniste